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Extrait de
Oswald de Andrade
Le samedi 11 novembre à l'exposition-manifeste Ah !Ah !Ah !, sous la direction de Pierre-Etienne Heymann, lecture publique du « Procès (en révision) de Jésus Christ » extrait de « L'Homme et le Cheval » pièce de Oswald de Andrade.<?xml:namespace prefix = o /><o:p>
</o:p><?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p>(pièce en neuf tableau de Oswald de Andrade, écrite en 1934, traduit du portugais, - Brésil -, par Gilles de Staal. Extrait.)
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</o:p><o:p>Huitième Tableau :
<o:p> </o:p>LE TRIBUNAL(Extrait)
<o:p></o:p> <o:p> </o:p>La scène représente la salle de l'ex-prix Nobel, érigée en Tribunal Révolutionnaire. Au fond, grande porte ouvrant sur le paysage classique du Golgotha, avec deux croix seulement.
<o:p> </o:p>Scène I
<o:p> </o:p>Mme Icare, Saint Pierre, Icare, la Véronique
<o:p> </o:p><o:p> </o:p>Au fond, soldats romains, femmes, apôtres, esclaves la foule qui était dans la maison de Pilate. La Véronique fait sécher des tirages photos grands formats
<o:p> </o:p>Saint Pierre : - J'ai l'impression de vous connaître...
La Véronique : - On se connaît oui...
Saint Pierre : - Je ne me souviens pas d'où. Je perds un peu la mémoire.
La Véronique : - Moi je me souviens. C'était à ce tintouin du Calvaire il y a vingt siècles. (Elle tourne de face la photographie qu'elle a en main et sur laquelle apparaît Adolf Hitler crucifié sur une swastika) Vous étiez des nôtres...
Saint Pierre (Reconnaissant la photographie) : - Mais lui c'est Christ ! Christ roi !
La Véronique : - Parfaitement ! Le chancelier Christ, la dernière incarnation de l'antisémitisme.
<o:p></o:p> <o:p> </o:p>Scène II
<o:p> </o:p>Les mêmes, Madeleine
Madeleine : - C'est ici que va avoir lieu le jugement du fils de David !
La Véronique : - Lequel d'entre eux ?
Madeleine : - Celui qui est là, sur ce portrait.
La Véronique : - Ah ! Le dernier Dieu aryen !
Madeleine : - Je suis témoin.
Saint Pierre (Se levant) : Madeleine ! Ma fille chérie !
Madeleine : - Qui êtes-vous ?
Saint Pierre : - Je suis le vieux Pierre.
Madeleine : - Le pêcheur de Génésareth ?
La Véronique : - Nous voilà tous ensemble à nouveau. Moi, avec les photographies, toi avec les parfums...
Madeleine : - Tu continues à me faire concurrence, Véronique !
La Véronique : - Pas du tout ! Je suis ici à titre administratif. Je prépare les pièces d'identité des accusés qui doivent comparaître aujourd'hui devant le Tribunal Rouge.
Madeleine : - Tu as tué l'art en Judée.
La Véronique : - Je n'ai été que la précurseure de l'industrie du portrait.
Madeleine : - Tu continues à gâcher l'art véritable. La Renaissance elle même n'a pu te résister. Tu t'es alliée aux curés pour inonder le monde avec tes chromos de saints souffreteux !
La Véronique : - Aujourd'hui, je me dédie au cinéma...
Madeleine : - J'ai vu. Le roi des rois. Sacré navet !
La Véronique : - Erreur. Je suis au service du cinéma d'Etat. J'ai évolué. Je suis le progrès en personne.
Madeleine : - Eh bien moi, je continue d'être l'art pour l'art.
La Véronique : - Toujours modèle d'atelier* ?
Madeleine : - Comme en Judée. Si tu n'étais pas apparue, on aurait pu avoir un art sémite natif, propre à fortifier l'unité sentimentale de la Diaspora. Cela aurait peut être engendré les plus grandes conséquences politiques. Mais un peuple dispersé et sans art, voilà ce que ça donne...
Saint Pierre : - Madeleine, je ne te reconnais pas. On dirait une députée de classe !
Madeleine : - Bien sûr ! Pour vous, j'ai surgi comme une prostituée analphabète du Premier siècle. Mais tout ça c'étaient du baratin. La Passion, la Croix, la Résurrection et le reste, baratin... Nous menions la lutte tenace contre l'impérialisme Romain... La lutte idéaliste !
Saint Pierre : - Les chansonnettes sur ta rue ! Qu'est-ce qu'on aimait ça !
La Véronique : - Tu récitais une poésie futuriste que le Rabi adorait...
Saint Pierre : - Récite pour nous souvenir. Se souvenir c'est vivre !
Madeleine (Récitant) :
Ma rue
Ma rue à Magdala
Remplie de putains
Rongées d'infections
Inondées de parfum
Mortes de faim
Personne ne vit dans ma rue
Parce qu'il le veut bien
Ni moi
Ni les autres malheureuses
Les Pharisiens fréquentent
Ma rue
Etroite
Qui sent le sperme et l'encens
Les hommes de loi y passent
Ils savent que le travail honorable
Ne rapporte rien
<o:p> </o:p>La femme et la fille du pauvre
Ne gagnent que quelques sous
Dans ma rue
<o:p> </o:p>C'est pour ça que ma rue est pleine
Pour cela que je pleure la nuit
Dans ma rue
Quand je me souviens de moi.
<o:p> </o:p>Icare : - Pauvres malheureuses ! Ca fait de la peine ! On devrait règlementer cela !
La Véronique : - C'est la monogamie qui les produit. Dans l'Etat Socialiste, elles appartiennent au Musée de l'Histoire.
(..........)
La suite, le 11 novembre, à la Galerie de Nesle, à la clôture de l'exposition-manifeste
Ah !Ah ! A3 Art- Anthropophagie Aujourd'hui !</o:p>
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